Cote/Cotes extrêmes
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Description physique
Origine
Biographie ou Histoire
En l'absence de recherches poussées, il ne peut être brossé qu'un tableau à gros traits dont les sources sont, d'une part, les souvenirs de M. Pierre Kern, et d'autre part, les actes de société déposés au tribunal de commerce et conservés en partie dans cette juridiction, partie aux Archives départementales (documents antérieurs à 1940).
A l'origine, un Alsacien entreprenant et inventif : Emile Kern, né en 1862, époux de Françoise Bornèque, installé dans le Territoire de Belfort après le traité de Francfort. D'après son petit-fils, il aurait passé sa vie à monter des entreprises. En 1890, il prit en gérance pour cinq ans une fabrique de boissellerie à Chaux, en société avec un commanditaire parisien, Charles Marcotte, sous la raison sociale « Emile Kern et Cie ». Son associé apportait le capital, lui, « son industrie » (Acte de société du 20 novembre 1890, ADTB, 6 U 53). De fait, il s'avéra ingénieux. Il inventa notamment des chevilles pour maintenir les traverses des rails. De ce fait, le mot « kerner » est entré dans le vocabulaire des cheminots pour désigner l'action de placer ces chevilles. A une date indéterminée, il fabriqua des bobines en bois pour l'industrie textile.
En 1910, il orienta son activité vers les toiles métalliques, profitant sans doute de l'opportunité que constituait la disparition du commerce de grillage jusqu'alors tenu par Jules Noet, puis par sa veuve, au 32 faubourg des Ancêtres à Belfort. Il ouvrit un magasin dans cette ville, 4 rue de Mulhouse et, du commerce, se lança parallèlement dans la fabrication. Il reprenait ainsi la tradition de la Maison Michel, entreprise qui, dès le milieu du XVIIIe siècle, avait tissé le métal à Mulhouse, puis après 1870, l'avait vendu à Belfort.
Ses fils Pierre (né en 1891) et Joseph (né en 1893), tous deux ingénieurs, donnèrent de l'extension à l'affaire en achetant, en 1919, à un petit industriel en serrurerie, Charles-Henri Schmerber, une propriété à Rougemont-le-Château, sur le chemin de Laval ; elle comprenait une maison de maître et différents bâtiments ateliers, forges, magasins, bâtiment pour loger des ouvriers, chute d'eau, canal d'alimentation avec barrage, jardins, étages, etc. d'une contenance de 3 hectares 40 ares. Ils s'associèrent le 8 octobre de la même année sous la dénomination « Kern frères » (société en nom collectif), pour fabriquer des toiles métalliques (Acte de société du 20 novembre 1890, 6 U 67). L'aîné prit en charge la partie technique de l'affaire, le commercial revenant au cadet dont le bureau et le dépôt de marchandises furent installés chez le père, Emile, qui leur loua, le 1er septembre 1920, sa maison 4 rue de Mulhouse à Belfort.
Les frères transformèrent leur entreprise en société anonyme le 23 mars 1923 ; elle est dénommée dès lors Etablissements Kern, avec un capital de 550 000 F et, pour objet, « la fabrication, la transformation, l'industrie et le commerce de fils et toiles métalliques, grillages, serrurerie, objets en métal et autres articles s'y rattachant » (Acte de société, 6 U 73). Siège social à Rougemont. Parmi les actionnaires figurent, outre les membres de la famille, des industriels de la proche région : Ernest Boigeol (de Giromagny), Gaston Zeller demeurant à Nancy, Ch.-Louis Dorget et Victor Ehrard, industriels à Rougemont, tous membres du Conseil d'administration. Il s'y adjoindra, Roger Zeller, industriel à Etueffont, Gendre, de Masevaux, et des banquiers, lors de l'augmentation du capital porté à 600 000 F en septembre 1944.
Les Kern tissèrent la toile métallique à Rougemont jusqu'en 1936 : grillage ondulé, à la main ; à simple torsion, à la main ou avec une machine semi-automatique ; à triple torsion, avec des machines plus perfectionnées. Mais l'entente entre les frères se défit. Joseph se rendit autonome en 1931. Il loua sous son nom propre à l'Armée du Salut, 5 rue de l'As de Carreau, un rez-de-chaussée qui lui permit d'installer un magasin de vente et un dépôt. Pierre, en 1936, changea complètement d'activités et partit pour la chambre de commerce de Besançon dont il devint secrétaire.
Les « Etablissements Kern » furent rachetés par le Société TREFILA qui en conserva la raison sociale. Leur direction fut confiée à des Israélites, Pierre et Théo Weiler, qui fabriquaient déjà du grillage en Sarre. Mais la guerre les fit fuir aux USA. Leur successeur, un sieur Stein, allemand mais également juif, mourut en déportation. Mise sous séquestre, l'usine de Rougemont vivota, pour être finalement vendue en 1957 à une filiale de THECLA (Delle).
Avec l'aide de son fils prénommé Pierre, comme l'oncle, Joseph relança la fabrication à Belfort en 1951, puis à Offemont. Sur une surface de 5 000 m, 2 rue de la Vieille Cornée, il ouvrit un atelier en janvier 1953 qui employait une vingtaine de personnes. Le 16 décembre 1954, il fit immatriculer son entreprise au tribunal de commerce sous la dénomination « Manufacture de grillages J. Kern » (Archives auTribunal de commerce). Le siège en était toujours rue de l'As de Carreau à Belfort ; l'objet : commerce de grillage, serrurerie grillagée ; installation de grillages, clôture ; fabrication de grillages, serrurerie grillagée, tamiserie, commerce de toiles métalliques. Les Kern se retrouvaient donc, comme dans les années 1920, à la fois producteurs (à Offemont), détaillants (à Belfort) et entrepreneurs dans le Territoire et les départements limitrophes puisqu'ils posaient les clôtures fabriquées dans leur atelier.
Joseph Kern mourut le 24 septembre 1963. Dès le mois d'avril son fils lui avait succédé comme P.D.G. et avait augmenté le capital. L'année suivante il transforma l'affaire en société anonyme sous l'appellation « Manufacture belfortaine de grillage » et en élargit l'objet, pour s'adapter à l'évolution des matériaux, aux « fils plastiques », à la fabrication de tous objets composant des grillages et fils plastifiés ou non ». La période de prospérité des années 1960 fut courte. En 1973, la société avait perdu les de son capital. Longtemps elle avait orienté ses activités vers le « sur mesure » : son argument de vente avait été « Nous fabriquons, nous livrons du non standard » (Cf. l'enquête réalisée par la Chambre de commerce de Belfort auprès de M. Pierre Kern en 1968, dans Horizons Belfort, n°66, p.8-10. Cet article donne des précisions intéressantes sur la fabrication et le marché du fil de fer). Mais c'était une politique onéreuse, difficile à rentabiliser. Et la pression de la concurrence étrangère poussait à la normalisation ; la firme belge BEKAERT, en 1967, avait réussi à accaparer 40 % du marché français avec une seule ronce. Puis l'arrivée des grillages italiens, produits à moindre coût et le choix du grillage comme article d'appel dans les grandes surfaces et les magasins de fourniture pour bâtiment, cassèrent les prix.
Le concurrent local de Kern, son ancien comptable, Parisot, installé à Plancher-Bas, dut arrêter sa fabrication en 1982. Pierre Kern lui-même, après avoir licencié 24 personnes, en fit autant l'année suivante. Il ne conserva que ses activités de commerce et de pose de clôtures avec 4 employés à Belfort provisoirement. Le 31 octobre 1985, il cesse toute activité et cède son droit de bail rue de l'As de Carreau à la société Florida Sportswear, de Soultz. Le 14 février 1986, une assemblée extraordinaire décide la dissolution rétroactive de la société au 31 décembre 1985 et la met en liquidation amiable.
Elle survivra néanmoins à travers ses archives. Au nom de leurs futurs utilisateurs, que M. Pierre Kern soit remercié d'en avoir fait don au Département.
1 Acte de société du 20 novembre 1890 (cote ADTB, 6 U 53).
2 Acte de société du 20 novembre 1890 (cote ADTB, 6 U 67).
3 Ibidem : 6 U 72.
4 Ibidem : 6 U 73.
5 Archives au tribunal de commerce.
6 Cf. l'enquête réalisée par la chambre de commerce de Belfort auprès de M. Pierre Kern en 1968, dans Horizons Belfort, n° 66, juillet 1968, p. 8-10. Cet article donne des précisions intéressantes sur la fabrication et le marché du fil de fer.
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